L’éloge il y a quelques jours que Monsieur  Bernard MAZUEL successeur de Monsieur Claude GRESSIER à l’Académie de Marine, un grand spécialiste des ports et du monde Maritime. Claude était Adhérent à l’Association MOR GLAZ. Dès le départ de Claude, son Epouse Fanny a pris le relais au sein de l’Association en y adhérent, nous la remercions pour cette délicate attention !

 

Claude Gressier (1943-2018)

 

Depuis sa disparition le 7 janvier 2018, de nombreux hommages ont été rendus à Claude Gressier. Celui de l’Académie de Marine intervient bien tard, plus de cinq années après son décès, la pandémie ayant mis à mal le programme de travail d’ordinaire bien huilé de l’Académie. Je me suis largement inspiré de ces vibrants hommages pour rédiger celui de notre Académie.

Claude, Marie, Edmond GRESSIER est né le 2 juillet 1943 à Valenciennes d’un père, Robert GRESSIER, ingénieur des mines et Directeur de société, et d’une mère, née Lucienne FALCE, ingénieur-chimiste.

Il étudie au Collège Notre-Dame à Valenciennes, à l’Oratory School à Woodcote en Grande-Bretagne, puis à l’Ecole Sainte-Geneviève de Versailles et à l’Institut d’Etudes Politiques de Paris.

Brillant élève, il intègre l’Ecole Polytechnique en 1963 et quitte l’Ecole Nationale des Ponts et Chaussées en 1968.

Il épouse le 23 juin 1967 Mlle Fanny DANSET, Normalienne et Agrégée de lettres, Universitaire. Ensemble ils auront 5 enfants : Alexis, Ambroise, Aurélien, Agathe et Violaine, dont deux sont présents ainsi qu’Alban, l’époux de Violaine ; et 16 petits-enfants : Chantal et Antoine ; Eleonore, Jean-Baptiste, Timothée, Martin et Anne-Charlotte ; Valentine, Sibylle et Côme ; Augustin, Juliette et Clément ; Georgia, Anouk et Ysé, dont trois sont ici présents.

Jeune ingénieur des ponts et chaussées, il découvre tour à tour le métier d’ingénieur d’arrondissement à la direction départementale de l’équipement (DDE) de la Somme de 1968 à 1971, celui de l’administration centrale comme chargé du bureau des voiries urbaines de 1971 à 1974, puis de la sous-direction des études et des programmes de 1974 à 1976 à la Direction des Routes.

Il devient conseiller technique au cabinet de Vincent Ansquer, alors ministre de la qualité de la vie, en 1976, avant d’être nommé l’année suivante Directeur du centre d’études des transports urbains au Ministère des Transports, poste qu’il occupera jusqu’en 1982. C’est lors de cette période qu’il publie en 1978  avec Jean-Louis Deligny, « Mieux se déplacer dans votre ville » aux éditions du Moniteur.

Il est nommé en 1982 Ingénieur en chef des Ponts et Chaussées et rejoint le Conseil Régional d’Île-de-France comme chargé de mission pour les transports jusqu’en 1984, puis comme Directeur des Transports et de la Circulation jusqu’en 1986.

Ainsi, en à peine quinze ans s’est-il initié aux problématiques des routes, des transports urbains, aux amorces des politiques environnementales et connaît aussi bien les travaux opérationnels, l’administration centrale et les services techniques, que les collectivités locales.

La période des transports terrestres (1986-1993)

Claude Gressier est nommé en 1986 Directeur des Transports Terrestres au Ministère des Transports, poste qu’il occupera jusqu’en 1993. À la tête de la Direction des Transports Terrestres, Claude Gressier veille aussi bien sur les transports routiers, les transports ferroviaires, et sur les transports collectifs urbains que sur les voies navigables ; il dispose aussi d’une solide sous-direction des affaires sociales, d’une sous-direction des affaires économiques et internationales et réunit régulièrement les missions du Tunnel sous la Manche et des matières dangereuses.

 

Claude Gressier sera sur presque tous les fronts : peu après sa prise de fonction pendant l’hiver 1986- 1987, les cheminots mènent leur plus long mouvement de grève depuis la création de la SNCF en 1937, du 18 décembre 1986 au 15 janvier 1987. La RATP en sera aussi affectée du 22 au 24 décembre 1986. Il sera notamment très impliqué dans l’élaboration de la directive relative au développement des chemins de fer communautaires qui initie, par leur séparation comptable, le processus de séparation de la gestion de l’infrastructure ferroviaire et de l’exploitation des services de transport des entreprises ferroviaires, et qui ouvre à la concurrence les transports combinés internationaux de marchandises.

Sur cette même période 1986-1993, il est également membre du Conseil d’Administration de la Régie Nationale des Usines Renault.

L’entrepreneur ferroviaire et routier (1993-1997)

En février 1993 et pendant plus d’un an, Claude Gressier rejoint la SNCF comme Directeur Adjoint en charge du secteur « Europe et marché » puis il est nommé en juin 1994 Président du groupe CTT SCETA dont, il poursuit la restructuration en profondeur, amorcée une dizaine d’années auparavant. Le 20 décembre 1995 la compagnie générale Calberson absorbe les sociétés Bourgey Montreuil, SCETA Transport et SCETA International et adopte la nouvelle dénomination de Groupe Geodis qui devient alors le premier groupe français de transport routier. Claude Gressier devient, dès sa création en décembre 1995, Président de ce nouveau géant français du transport. Sous sa présidence, le groupe est privatisé le 20 août 1996 et se restructure en quatre branches d’activités : la Logistique, l’Overseas, la Messagerie et la Route, structure qui perdure encore aujourd’hui.

A la tête de Géodis qu’il va rapidement développer, Claude Gressier va également – et ceci touche aux activités de l’Académie – perpétuer le contrat de sponsoring initié sous SCETA, permettant ainsi au navigateur Christophe Auguin de remporter le 17 février 1997 le Vendée Globe, course autour du monde en solitaire sans escale ni assistance, sur « Géodis », un 60’ Imoca en carbone, et d’établir par la même un nouveau record du monde en 105 jours. Géodis est l’ex-Sceta-Calberson remis à niveau avec notamment la mise en place d’une quille pivotante, innovation dont Géodis est le premier 60 pieds à profiter avec le PRB d’Isabelle Autissier.

Cette victoire contribuera grandement à la notoriété auprès du grand public du tout jeune groupe Géodis, Claude Gressier se révélant à cette occasion un excellent communicant.

Le temps de l’aventure portuaire (1998-2001)

Un an plus tard, en février 1998, notre confrère va découvrir un nouveau pan du secteur des transports : Il retourne en administration centrale comme Directeur des transports maritimes, des ports et du littoral et il est à ce titre nommé en mai 1998 Commissaire aux transports maritimes. Il assume également sur cette même période la Vice-Présidence du Conseil Supérieur de la Marine Marchande, le CSMM. Il occupera ces trois fonctions jusqu’en 2001.

Claude Gressier a abordé le monde portuaire en bénéficiant de sa large expérience du fret. Il co-produira plus tard un rapport sur la modernisation des ports autonomes décrivant les transformations à y opérer pour rendre ce secteur plus compétitif, rapport qui servira de base à la réforme portuaire de 2008.

Son expérience du secteur des transports enrichie des secteurs maritimes et portuaire, aucun des modes de transport ne lui aura été étranger.

Le Président de la section économie du conseil général des ponts et chaussées (CGPC) (2001- 2009)

 En 2001, Claude GRESSIER est nommé Président de la section Economie et Transports du Conseil Général des Ponts et Chaussées qui deviendra en 2008 le CGEDD, le Conseil Général de l’Environnement et du Développement Durable. Il le restera 8 ans, jusqu’en 2009, tout en siégeant en parallèle au Conseil d’Administration de la SNCF d’août 2006 à février 2013 et pendant près de dix ans à celui d’Air-France KLM, de 2004 à 2013.

Tout en présidant cette section, Claude Gressier produit vingt rapports dont dix sous sa seule signature. Ses thèmes de prédilection sont à la fois l’économie des transports et notamment la couverture des coûts des infrastructures routières, mais aussi les grandes infrastructures de transport ferroviaires : LGV Lyon-Chambéry, LGV Sud-Europe-Atlantique, autoroute ferroviaire Perpignan-Bettembourg. Il conduit également un audit des grands projets d’infrastructure et une démarche de prospective des transports. Cette dynamique se poursuit encore aujourd’hui au sein du Conseil Général du Développement Durable.

En parallèle, il préside de 2001 à 2009 la Commission des comptes du logement et est également Vice-Président de la Commission des comptes des transports de la nation.

Une retraite active et engagée (2009-2018)

Claude Gressier prendra sa retraite en 2009, mais va poursuivre durant celle-ci son activité au service du Ministère des Transports en y exerçant plusieurs éminentes fonctions :

° Délégué interministériel au Lyon-Turin à partir de 2009 : il a négocié avec une grande habileté l’accord gouvernemental de ce corridor avec la partie italienne, explique Noël de Saint-Pulgent, et obtenu des avantages significatifs pour notre pays, non seulement sur la gouvernance, mais aussi sur le financement de l’infrastructure.

° Président du Conseil de coordination interportuaire de la Seine à la DGITM, de 2009 à 2014,

Il a de plus apporté jusqu’à ses derniers jours une intense contribution à la vie associative professionnelle et à de nombreux cercles de réflexion :

  • Premier délégué de la section française de l’AIPCN (Association mondiale pour des infrastructures de transport maritime et fluvial) de 2002 à 2015.
  • Vice-président de la COFHUAT (Confédération française pour l’habitat, l’urbanisme et l’aménagement du territoire) de 2010 à 2018.
  • Vice-Président de l’association Centre-ville en Mouvement de 2005 à 2018.
  • Et Membre (2009-2018) du conseil scientifique du think-tank TDIE (Transports, Infrastructures et Mobilités) et du Cercle des Transports. C’est dans le cadre de TDIE que je l’ai connu et apprécié – il a activement participé à l’organisation du colloque sur les ports que TDIE et l’Union des Ports de France ont conjointement organisé, colloque s’est tenu au Palais de la Bourse, à Paris, le 16 octobre 2016. Il avait été précédé de très nombreuses auditions et de deux déplacements, à Marseille et au Havre – où je me souviens que nous avions été reçus à dîner par le maire et membre actif du Conseil de Surveillance du Grand Port Maritime du Havre, M. Edouard Philippe. Je garde en mémoire à la fois le souvenir des immenses compétences de Claude et du respect que j’avais pour lui à ce titre, mais aussi celui de ses grandes qualités humaines, sa simplicité, sa facilité à partager ses connaissances et à discuter. Un grand Monsieur !

 

  • Enfin, il a été élu en 2017 Membre de la section Marine Marchande, Pêche et Plaisance de l’Académie de Marine, où il succédait à un autre grand personnage du secteur maritime et portuaire, notre ancien Président Jean Chapon qui venait de demander l’honorariat et avait proposé Claude pour lui succéder. Claude est disparu prématurément et n’a malheureusement pas eu le temps de nous faire profiter de la pleine mesure de ses immenses compétences.

Claude Gressier était Commandeur de la Légion d’Honneur et Officier de l’Ordre National du Mérite.

Sur un plan plus personnel, il aimait les voyages, la musique et l’opéra. Il était animé d’une grande foi.

Mme Gressier a eu l’extrême amabilité de nous ouvrir son album de souvenirs, qui a permis de constituer le diaporama qui défile en ce moment. Beaucoup de photos de l’homme public, et quelques-unes plus intimes du mari, du père et grand-père aimant et regretté qu’il a été. Merci Madame !

En octobre 2017, Claude et Fanny GRESSIER avaient invités leurs 5 enfants et 16 petits-enfants à venir célébrer avec eux leurs 50 ans de mariage à New-York. Claude se savait déjà bien malade et a tenu à partager avec tous les siens ce très beau moment de bonheur familial dont vous avez pu découvrir quelques photos dans ce diaporama.

Il est décédé le 7 janvier 2018. Sa messe de funérailles a eu lieu dans sa paroisse, en l’église Sainte- Bernadette de Versailles, le 12 janvier, et une messe du souvenir a été célébrée le 26 janvier dans cette même église.            Sa disparition a ému beaucoup de monde, les hommages rendus ont été nombreux et unanimes à décrire un homme d’un immense talent qui savait en toutes circonstances se montrer pédagogue, modeste et généreux.

Parmi les nombreux commentaires élogieux reçus de tous ceux qui l’ont connu, je voudrais en citer cinq ou six, sur lesquels je concluerai cet éloge :

Mme Chantal Lecomte : « Il était capable de piloter un nombre infini d’affaires, tout en déléguant et en faisant confiance à son équipe. Il pouvait discuter et négocier avec un nombre d’interlocuteurs impressionnant, élus régionaux ou nationaux, patrons de grandes entreprises, responsables de grandes organisations professionnelles, en passant par tous ses homologues des autres ministères, sans parler des relations avec les cabinets d’un ministre de droite puis de gauche. »

Jean-Marc Médio : « J’ai passé 12 années enrichissantes aux côtés de Claude, j’ai toujours apprécié sa simplicité, sa disponibilité, son sens de l’écoute et le bon sens de ses propositions. Les congrès, les Assemblées Générales annuelles, ont été l’occasion de voyages enrichissants et ont permis de nouer entre nous, avec nos épouses, des relations amicales solides. Une pensée particulière pour Fanny Gressier qui toujours, aux côtés de son époux, animait nos conversations de sa grande culture littéraire. »

Professeur Michel Hagège : « Les multiples expertises de Claude Gressier, grand ingénieur et manager, dans tous les modes de transport, sa clairvoyance et sa rigueur intellectuelle, le rendaient incontournable dans maints débats de fond ou en amont de prises de positions importantes de politiques publiques. »

Noël de Saint-Pulgent : « Claude Gressier a été l’un des plus brillants ingénieurs des Ponts de sa génération, un grand serviteur de l’état pour lequel j’avais beaucoup de considération et d’amitié. Soucieux d’aller au fond des choses et dont les décisions s’appuyaient sur de solides connaissances techniques. »

Olivier Paul-Dubois-Taine : « Discrètement mais avec une grande fermeté, Claude était un homme extrêmement bien organisé, respectueux de son entourage, faisant un maximum lui-même, doté d’une grande capacité de jugement, il avait bien compris avant l’heure le management moderne des femmes et des hommes. Il avait le talent de savoir exposer à un politique de manière compréhensible des problématiques extrêmement complexes. »

Et je terminerai en citant son ami Geoffroy Caude, qui regrette de ne pouvoir être parmi nous : « Sa clairvoyance, sa perspicacité et son sens aigu de la chose publique nous ont tous marqués et sa disparition laisse un grand vide ».

Je vous remercie de votre attention.