RECOMMANDATIONS ET INFORMATIONS DE BASE
POUR LES JOURNÉES D’ÉTUDES SUR LA SÉCURITÉ ET LA SANTÉ
DANS L’INDUSTRIE DE LA PÊCHE.
OBSERVATOIRE DES DROITS DES MARINS,
Université de Nantes, France, 17-18 mars 2005
Rédigé par : Andrew M. Mwangura Coordinateur de Programmes Programme d’Assistance aux Marins P. O. Box 92273 Mombasa, 80102, Kenya Cell phone: 254 721 393458 Fax: 254 (41) 230001 Email: mwangura@yahoo.com
L’INDUSTRIE DE LA PÊCHE REMERCIEMENTS :
La rédaction de ce document a été faite à la suggestion de Patrick CHAUMETTE, professeur à la Faculté de Droit et de Science Politique de l’Université de Nantes, France, et de James SMITH, membre du comité d’orientation de l’Observatoire.
Je tiens à les remercier de l’ opportunité qu’ils m’ont offert d’être utile à l’Observatoire des Droits des Marins.
La réalisation de ce dossier n’a été possible que grâce au soutien et aux contributions multiples de divers groupes, particuliers et organisations.
Je leur suis très reconnaissant à tous, et me permets de citer quelques-uns ici.
Je remercie tout particulièrement le Super intendant de la Marine Marchande kenyane, les services de la Bibliothèque Nationale du Kenya, l’Institut de la Recherche Marine et Halieutique du Kenya, et Ecoterra International.
J’exprime toute ma reconnaissance à Madame Nancy Karigithu, avocate maritimiste à Mombasa, dont la contribution a été essentielle à la rédaction de ce document.
La réalisation de ce dossier a été rendue possible par les pêcheurs qui ont bien voulu fournir des informations à plusieurs reprises.
J’espère que ce dossier constituera un pas vers le développement d’approches innovantes pour la coopération entre l’UE, le BIT, l’OMI, les nations de l’OCDE et de l’Afrique pour un effort collectif pour protéger les pêcheurs et pour développer le secteur de la pêche africaine.
Andrew M Mwangura.
TOILE DE FOND:
Des textes font état d’une implication kenyane dans le commerce maritime à partir du 9ème siècle lorsque des arabes originaires d’Oman ont fait de l’Ile de Manda, à 250 kms au nord de Mombasa, leur base et leur port d’attache.
Pendant la deuxième moitié du 15ème siècle, les Portugais ont délogé les dirigeants arabes et en 1505 ont fait de Mombasa le centre de leur administration.
Les Anglais ont occupé le Kenya en 1886 et la construction du port de Mombasa commença peu après.
Il faut souligner que les activités des colonisateurs se sont développées surtout sur la côte, car la navigation était à l’époque l’unique mode de transport.
L’avènement du transport aérien n’a pas beaucoup modifié la situation puisque 90% du commerce mondial se fait toujours par voie maritime.
Le Kenya possède une côte d’environ 640 kms et une longue expérience de la navigation.
Cependant, malgré sa position géographique, le pays n’a pas exploité son potentiel en ce qui concerne la navigation internationale, principalement en raison de l’absence d’une politique maritime cohérente et de son incapacité à mettre en place un cadre juridique, institutionnel et administratif pour l’exploitation des régions maritimes.
En raison de cette carence, le Kenya n’a pu se maintenir au niveau des évolutions technologiques sur la scène maritime internationale.
Ainsi des conventions internationales majeures concernant le commerce, la sécurité maritime, la pollution marine, la formation et la certification des marins et des pêcheurs, le sauvetage en mer, la préservation de l’environnement marin et la sûreté maritime n’ont pas été mises en œuvre dans le pays, ce qui a retardé le développement du secteur maritime.
Au Kenya, l’Autorité des Ports a la responsabilité de l’administration maritime et nomme le Superintendant de la Marine Marchande qui fait appliquer le Merchant Shipping Act ( la Loi de la Marine Marchande du Kenya).
La Loi de la Marine Marchande du Kenya de 1967 est dérivée de la Loi de la Marine Marchande du Royaume-Uni de 1894, amendée plusieurs fois depuis, alors que notre Loi est restée inchangée.
La Loi a plus de 30 ans. Elle est désuète, et ne couvre pas les importantes conventions internationales concernant la navigation et la législation maritime que le Kenya a ratifiées.
Cette Loi de la Marine Marchande n’a pas inclus non plus d’importantes recommandations, codes et procédures concernant le contrôle de l’Etat du port, la gestion sûre des navires, la manutention de cargaisons dangereuses et à risques, ainsi que le système mondial de détresse et de sécurité en mer (GMDSS).
Le Kenya est signataire du Mémorandum (MOU) de l’Océan Indien sur le contrôle de l’Etat du port.
Selon le MOU, le superintendant de la marine marchande est tenu de faire inspecter 15% de tous les navires faisant escale dans les ports kenyans afin de promouvoir la sécurité de la navigation. La Loi de la Marine Marchande ne fournit pas la base juridique pouvant permettre de telles inspections et par conséquent le Kenya ne peut remplir les obligations imposées par le MOU.
L’inadaptation de la Loi de la Marine Marchande du Kenya a été souligné par ailleurs par l’incapacité du Kenya à satisfaire les conditions minimales pour son acceptation par l’OMI dans la » liste blanche » des nations ayant fait la mise à niveau permettant le respect de la convention STCW 95.
Ceci a rendu les marins kenyans inemployables pour des embarquements sur des navires étrangers faisant le commerce international.
Cela pourrait également avoir de sérieuses répercussions dans la mesure où les navires enregistrés au Kenya pourraient se voir refuser l’entrée dans les ports d’autres pays.
Afin de surmonter ces obstacles, il conviendrait que le gouvernement du Kenya :
a. Formule et développe une politique maritime au plan national, afin d’orienter l’administration et la réglementation du secteur maritime : le commerce maritime, les services maritimes, le bien être des marins et des pêcheurs, l’infrastructure portuaire, la sécurité maritime, la juridiction maritime, l’éducation maritime, la formation et la recherche, la lutte anti-pollution et le cadre législatif approprié.
b. Porte son attention sur le cadre législatif et institutionnel de l’administration maritime au Kenya, compte tenu du fait que le bureau du superintendant de la marine marchande opère sous la direction de l’Autorité Portuaire du Kenya. Ceci constitue un conflit d’intérêts et d’attributions, puisque l’Autorité Portuaire du Kenya est à la fois fournisseur de services et instance de contrôle.
c. Revoir complètement la Loi sur l’Emploi, la Loi sur la Pêche et la Loi sur la Marine Marchande afin de les adapter au divers accords et conventions dont le Kenya est signataire. Malheureusement, la Loi sur la Pêche n’apporte aucune protection aux pêcheurs pour ce qui est de leurs conditions d’emploi. De même, la législation du travail au Kenya est muette sur le bien-être des pêcheurs et des marins. Il serait urgent d’agir sans plus tarder dans ces domaines, qui conditionnent et déterminent le recrutement et l’embarquement durable des marins kenyans à bord de navires faisant du cabotage et du commerce international, ainsi que sur les navires de pêche.
J’ai la ferme conviction que ces mesures sont susceptibles d’améliorer les conditions sociales des pêcheurs et des marins de commerce, évitant leur exploitation inacceptable grâce à la conclusion d’accords sérieux sur les conditions de vie et de travail à bord.
LES MARINS KENYANS : SOUFFRIR EN SILENCE
Depuis très longtemps, les larmes des marins kenyans opprimés sont devenues un torrent qui ne se tarit pas.
Elles sont versées par les victimes d’innombrables actes d’oppression et de piraterie en mer. Ces victimes ont souvent l’impression qu’ils n’ont personne pour les soutenir et que personne ne se soucie vraiment d’eux.
Malgré ce torrent de larmes, nombreux sont ceux qui restent insensibles à la souffrance des pêcheurs et des marins. Ils se détournent de la douleur des marins.
Il coûte de dire que depuis longtemps les marins kenyans ont été représentés de facon équivoque et peu efficace. Ils ont été grugés par des avocats maritimistes locaux. Ils ont été tout simplement ignorés, sous-estimés ou rejetés par leurs oppresseurs et par leurs propres leaders syndicaux ou par l’inspecteur ITF local, censés les aider. Marins et pêcheurs kenyans n’ont pas trouvé le moyen d’obliger le gouvernement kenyan et leurs employeurs à changer le traitement injuste qu’ils subissent.
La triste réalité est que 80% des marins kenyans sont sans emploi et ceux qui en ont sont, en fait, des gens dépourvus de droits fondamentaux et privés de tout recours à des procédures normales de conciliation.
Une étude sur les débouchés et les rigidités du marché du travail réalisée en 2002 par le Programme d’Assistance aux Marins (SAP) a démontré que 165 pêcheurs kenyans travaillent à bord de chalutiers locaux appartenant à des intérêts italiens ou coréens, alors que 295 travaillent sur des navires opérant pour l’UE, dont la plupart sont des chalutiers et palangriers espagnols. Et environ 65 travaillent sur des palangriers coréens.La flotte de pêche kenyane est composée de 17 chalutiers d’appartenance italienne et 3 chalutiers d’appartenance coréenne.
Aucun des navires locaux d’appartenance italienne, coréenne ou communautaire embarquant des Kenyans ne respecte les Conventions et normes internationales de l’Organisation Internationale du Travail, pas plus qu’elles ne sont appliquées dans le cadre de l’accord de pêche avec l’UE.
Outre le fait d’être sous-payés, les pêcheurs Kenyans embarqués à bord des navires locaux d’appartenance italienne, coréenne et communautaire n’ont généralement pas d’horaires de travail réguliers : dès que les navires sont en pêche, les périodes de repos sont peu fréquentes, jusqu’à ce que le capitaine soit satisfait d’avoir pris et stocké suffisamment de poisson.
Malheureusement, il n’y a pas de véritables accords, ni de mesures en ce qui concerne la sécurité et la santé à bord. Il n’y a ni soins médicaux en mer, ni système de sécurité sociale pour les marins des navires de pêche locaux et étrangers.
En plus d’être sous-armés, les navires de pêche locaux italiens et coréens sont sous-normes.
Selon le Ministère de l’Elevage et de la Pêche , le Kenya connaît actuellement un déficit sérieux en poisson et en produits dérivés. Ce déficit s’élève à plus de 200.000 tonnes. Les besoins en protéine de poisson sont de 9,5 kg par an et par personne pour une population de 30 millions.
Cela se traduit par un besoin de 300.000 tonnes par an, ce qui illustre le déficit critique existant actuellement en raison de la pêche INN dans cette région par les navires de l’UE, de la Corée et d’armateurs locaux, ainsi que de l’absence de politique nationale de pêche.
Les exportations de poisson rapportent Kshs. 4 milliards ($50 million US) au Kenya par an. Les détaillants de poisson ont un chiffre d’affaires annuel de Kshs. 6 milliards ($75 million US) dans un secteur qui contribue 4% au PNB du pays.
Actuellement le pays n’est en mesure de produire que 70.000 de tonnes de poisson, 90% provenant du Lac Victoria, qui compte plus de 40,000 pêcheurs.
LA PECHE INN :
Les pêcheurs Kenyans ont été concernés par de nombreux actes de piraterie le long des eaux territoriales somaliennes: 5 navires de pêche kenyans, 2 Coréens, 3 Italiens et 3 Russes ont été impliqués.
Malheureusement, toutes les confrontations entre les milices somaliennes et les équipages de navire ne se sont pas résolues de façon pacifique.
Certaines se sont soldées par la violence, avec morts d’hommes, ainsi que des blessés physiques et psychologiques des deux côtés. Des millions de dollars de biens d’équipement ont été perdus.
Il est estimé que les riches pêcheries au large de la côte somalienne, longue de 3300km, ont une production marine annuelle durable de 300000 à 500000 tonnes.
Avant le déclanchement de la guerre civile en Somalie suite à l’éviction du dictateur Mohammed Said Barre en 1991, les statistiques de la pêche faisaient état d’une production annuelle officielle de 20000 tonnes, à peine 4% de la production potentielle.
Les pêcheurs artisans et les navires étrangers dotés de licences totalisent la moitié de ces prises.
Si les ressources étaient exploitées de façon optimale, la production de pêche pourrait contribuer de façon substantielle au PNB du pays.
Les activités de pêche illégale dans la région de l’Océan Indien ont été soutenues par des Kenyans, des Coréens, des Italiens et des pays riches pratiquant la pêche en eau profonde.
L’absence de gouvernement central en Somalie a laissé libre cours aux opérations de pêche à grande échelle provenant de toutes parties du monde et utilisant des méthodes et des engins de pêche bannis sur le plan international.
Les chalutiers n’ont rien de banal : ce sont des mastodontes, surpuissants, capables non seulement de remorquer d’autres chalutiers plus petits, mais également assez vastes pour transporter à leur bord un avion de taille moyenne. Ils transforment des tonnes de produits de la mer au cours d’une session de travail de 6 heures.
Par conséquent, certains Somaliens ont pris la décision de protéger eux-mêmes leurs eaux territoriales et se sont lancés dans le business de la prise d’otages.
Des statistiques ont été établies par le chercheur somalien M. Abdirahman Jama Kulmiye sur la pêche des navires étrangers au large des côtes somaliennes.
Il y a 300 navires pratiquant la pêche INN au large de la République auto-proclamée du Puntland et 700 autres pêchant le long de la côte somalienne.
Ils visent des produits de la mer haut de gamme tels que des crevettes, des homards, et des espèces démersales qui se vendent chers dans l’UE et sur d’autres marchés internationaux.
Autre tricherie, la véritable identité des armateurs est couramment occultée en enregistrant les navires sous pavillons de complaisance et en utilisant des sociétés-écrans au Kenya, les ports kenyans devenant ainsi les bases avancées de campagnes de pêche vers les riches pêcheries des eaux somaliennes.
En outre, les propriétaires de chalutiers engagent des milices pour garder les navires pendant leur séjour dans les eaux territoriales somaliennes.
LES ATTAQUES DE PIRATES :
Malgré la présence de milices à bord les navires, des somaliens armés ont réussi à arraisonner plusieurs navires de pêche kenyans armés avec des pêcheurs kenyans. Le SAP a relaté plusieurs incidents de ce genre.
En 1997, des pirates se sont emparés d’un navire italien enregistré au Kenya, le Bahari Hindi, et l’ont séquestré pendant 45 jours à Kismayo, en Somalie. Ils ont demandé une rançon de 500000 Dollars US pour relâcher un équipage de 36 hommes composé d’Italiens, de Polonais, de Kenyans, de Roumains, de Tanzaniens et de Sénégalais.
En décembre 2001, le Bahari Kenya, un autre navire italien enregistré au Kenya, a été séquestré à Elly Port, en Somalie, pendant 99 jours, avec un équipage de 33 marins, parmi lesquels il y avait des Italiens, des Kenyans, des Roumains, des Somaliens et des Espagnols. Cette fois, la rançon demandée s’élevait à un million de Dollars US.
En 2003, 15 Kenyans, 9 Indonésiens et 3 Coréens ont été pris en otage à bord le Beira 3, battant pavillon coréen, et ne furent relâchés qu’au bout de 6 mois.
Ceux qui ont eu à affronter le banditisme maritime ont des histoires effroyables à raconter, mais, devant le besoin de gagner leur vie, ils ont développé une âme d’aventurier défiant la mort.
Certains ont été pris deux, voire trois fois, mais il faut plus que la peur pour les pousser au chômage.
Leurs geôliers sont toujours armés de fusils d’assaut AK 47, de bazookas, et de lanceurs de grenades.
Les preneurs d’otages commencent par extraire tout le carburant du navire.
Puis ils emmènent toute la nourriture fraîche et nourrissent l’équipage pris en otage avec de la nourriture périmée somalienne.
Au cours d’interminables négociations au sujet de la rançon, les captifs sont généralement battus et menacés de mort si la rançon n’est pas payée.
L’expérience des otages est vraiment affligeante. Ils disent que les pirates prennent le contrôle des navires avant de mettre hors d’usage le système de communications radio. Ils sont sous surveillance constante car tout étranger est considéré comme un objet de grande valeur. La prise d’otage est une affaire très rentable en Somalie.
Ceci n’est qu’un échantillon des expériences effroyables des marins kenyans aux mains de ces pirates modernes.
Comme ces activités de pêche dans les eaux somaliennes sont contraires à la Convention de Montego Bay (UNCLOS), je demande que l’UE boycotte tous les produits de la mer en provenance du Kenya afin de contraindre le gouvernement kenyan à réprimer les entreprises de pêche locales qui opèrent illégalement dans les eaux somaliennes.
LES CONDITIONS DE VIE ET DE TRAVAIL A BORD LES NAVIRES DE PECHE
Dans les pays en développement comme dans les pays industrialisés, la pêche demeure l’une des activités les plus dangereuses. La pêche a toujours été dangereuse.
Le BIT estime le taux de mortalité à 150 à 180 par 100000 travailleurs. On considère que les conditions de sécurité à bord des navires de pêche sont encore pires que ce qu’indiquent les statistiques car les accidents ne sont pas tous enregistrés.Le BIT estime également que plus de 24000 pêcheurs et personnes travaillant dans l’aquaculture et la transformation du poisson sont tués chaque année. En raison de la culture de peur, les conditions inhumaines sur les navires de pêche tels que les sévices physiques et mentaux – et même le meurtre – sont également minorés. Le programme de suivi du bien être des marins mis en œuvre par SAP depuis une dizaine d’années montre que ni les horaires de travail, ni les périodes de repos ne sont réguliers. Il n’y a généralement pas de vêtements de travail et la plupart des pêcheurs Kenyans sont sous-payés. Ils gagnent en moyenne 100 $ US par mois, ce qui est bien moins que les 800 $US que gagnent les membres d’équipage d’autres pays.
Les pêcheurs conservent une culture de peur parce qu’ils savent que s’ils se plaignent, ils perdront non seulement leur emploi actuel, mais seront exclus de toute embauche à l’avenir.
Entre 1983 et 2003, un Sénégalais, 16 Tanzaniens et 47 pêcheurs Kenyans ont péri en mer, alors que 121 ont été grièvement blessés et 37 ont eu les doigts gelés (voir en annexe).
Il existe peu d’instruments internationaux réglementant les normes de sécurité et de bien-être sur les navires de pêche, et ceux qui existent ont beaucoup de lacunes.
Par exemple, les instruments internationaux réglementant les conditions à bord des navires de pêche ont fait l’objet de peu de ratifications à ce jour.
La mise en application par l’Etat du pavillon fait l’objet d’une interprétation très large quant aux normes et aux moyens de contrôle à mettre en œuvre.
A peu d’exceptions près, les instruments s’appliquent aux Etats du pavillon, sans se référer aux responsabilités de l’Etat du Port.
Il n’y a pas de véritable système de contrôle de l’Etat du port pour les bateaux de pêche.
La plupart des conventions ne concernent que les bateaux de plus de 24 mètres de long, alors que la majorité des accidents et des décès se produisent sur des bateaux plus petits.
Il y a de grosses lacunes dans la législation nationale et internationale quant au traitement convenable des cas de violences physiques ou de harcèlement moral sur les navires de pêche, notamment en ce qui concerne les navires coréens.
En plus des déficiences des instruments internationaux existants, la communauté internationale est incapable de proposer d’autres solutions.
Par exemple, beaucoup d’Etats du pavillon sont laxistes par rapport à leur obligation d’assumer le contrôle et la juridiction effective des questions administratives, techniques et sociales à bord des navires battant leur pavillon, comme l’exige la Convention de Montego Bay (UNCLOS).
Les Etats du Port sont en infraction par rapport à UNCLOS en ne libérant pas les équipages sur des navires arraisonnés pour non respect de la réglementation sur la pêche.
Si certains Etats rechignent à appliquer les normes, d’autres, comme le Kenya, n’ont pas élaboré de normes.
RECOMMANDATIONS:
Il y a un besoin urgent et sérieux de mécanismes capables de prévenir la violence, les abus et la discrimination à bord des navires de pêche.
Il faudrait également encourager les Etats à ratifier et à mettre en œuvre les instruments internationaux concernant la sécurité à bord des navires de pêche.
Les instruments internationaux qui établissent les normes sur les navires de pêche devraient inclure des dispositions engageant le contrôle de l’Etat du Port. Les Etats côtiers devraient exiger le respect des instruments internationaux en ce qui concerne les licences de pêche.
Les assureurs devraient également exiger ce respect comme une condition préalable pour la couverture P&I et coque.
Et surtout, l’industrie de la pêche elle-même devrait être encouragée à changer son attitude envers la réglementation de la sécurité à bord des navires de pêche.
Le secteur de la pêche doit améliorer sa coopération avec les gouvernements et avec les organisations internationales pour élaborer et mettre en oeuvre des mesures raisonnables et pratiques pour la protection de sa richesse première : les marins embarqués sur les navires de pêche. Il y a un besoin de ratification et d’application d’UNCLOS, non seulement pour protéger les mers de la pollution mais aussi pour gérer les ressources océaniques de pêche de façon plus efficace et plus responsable.
Les plans d’action de la FAO, tel que le Code de Conduite pour une pêche responsable, ainsi que d’autres engagements d’organismes internationaux ou des Nations Unies relatifs à la conservation et à la gestion des stocks de poissons doivent être mis en œuvre. Comme je l’ai dit plus haut, il conviendrait que l’UE boycotte le poisson et les produits de la mer du Kenya afin que :
1. Le gouvernement kenyan réprime les compagnies nationales de pêche qui pêchent illégalement dans la région de l’Océan Indien occidental.
2. Le gouvernement kenyan élabore une politique de pêche.
3. Le Kenya respecte les instruments du BIT et de l’OMI sur le bien être des marins et des pêcheurs, ainsi que les conventions SOLAS et STCW.
Il y a un besoin urgent que l’UE boycotte tous les produits de la mer en provenance du Kenya car il y a un lien entre la pêche illégale, le trafic des armes, la production et le trafic de drogues dans la région de l’Océan Indien occidental.
La capacité de suivi de ces questions dans la région de l’Océan Indien occidental doit être renforcée. J’invite l’Observatoire des Droits des Marins à renforcer la collecte de données, le traitement de celles-ci, et la diffusion de l’information afin d’éviter les actuels problèmes de sous-information.
Il convient de souligner également qu’il faudrait nommer un inspecteur ITF compétent dans le port de Mombasa afin que nous puissions combattre la navigation de complaisance et sous normes dans la région de l’Océan Indien occidental.
Mes amis, du fait que mon engagement militant consiste à ‘remuer la boue’ et à ‘appeler un chat un chat’, j’ai eu des relations difficiles avec certains fonctionnaires, des armateurs locaux, des élus politiques, des barons de la drogue, des syndicalistes, des aumôniers et même des inspecteurs ITF.
J’ai également reçu des menaces par téléphone d’agents de sûreté et d’avocats maritimes locaux pour avoir exposé leurs arrangements occultes pour gruger les marins dans les tribunaux. Mon travail m’a amené beaucoup de problèmes de la part de ces gens-là, dont certains seraient complices d’activités criminelles dans le secteur maritime.
Les raisons pour lesquelles si peu de cas sont connus s’expliquent par les faits suivants :
1. Le secteur de la pêche est isolé du reste des activités maritimes.
2. La législation maritime qui régit les opérations des navires de commerce ne s’applique pas aux activités des navires de pêche.
3. La plupart des équipages de navires de pêche ne possèdent ni documents d’identités ni certificats de marins de commerce
4. Les pêcheurs sont souvent recrutés aux portes des armements de pêche.
5. Les pêcheurs ne connaissent pas leurs droits comme marins, ni les ressources qui existent pour les soutenir
6. La plupart des pêcheurs ont peur de se plaindre de leurs conditions de travail de crainte d’être mis sur liste noire en tant que fauteurs de troubles.
J’ai recueilli des informations concernant quelques cas sur des sujets aussi divers que la pêche illégale, les attaques de pirates, l’abandon d’équipages, les salaires impayés, les mauvais traitements, les décès de marins et les naufrages de navires.
Ces cas mettent en lumière les dangers qui existent pour les pêcheurs et les lacunes de la législation internationale et de la Loi de la Pêche du Kenya pour fournir des solutions efficaces à des problèmes à répétition.