COMMENT APPREHENDER LE GIGANTISME DES DERNIERES GENERATIONS DE PORTE-CONTENEURS Traduction d’un Article écrit par 2 Pilotes de Rotterdam dans la Revue  » Port Technology International « 

Le 16 décembre 2012 le  » CMA CGM MARCO POLO  » effectuait son escale inaugurale à Rotterdam. Ce porte-conteneurs (PC) d’une capacité de plus de 16 000 EVP (Conteneurs de 20 pieds de long) ainsi que ses sister-ship sont actuellement les plus grands au monde, mais d’ici quelques mois ils seront détrônés par la série des  » Triple E  » de la Compagnie danoise Maersk qui eux auront une capacité de 18 000 EVP ! Cette course au gigantisme dans le transport conteneurisé n’est pas un cas isolé puisque dans d’autres segments du transport maritime nous assistons à la même dérive (Chez les vraquiers il y a ceux que l’on appelle les  » Valemax « , chez les paquebots la sortie de la série  » Oasis of the seas  » dont les chantiers de l’Atlantique construiront le prochaine exemplaire à repousser toutes les limites et pour les gaziers même course au gigantisme avec les  » Q Max « ). Cette tendance met la pression sur tous les acteurs portuaires. Dans cet article les auteurs se focalisent sur l’impact de ces  » baleines  » dans l’environnement portuaire.

Caractéristiques des  » Ultra Large PC « 

Les navires de la série  » EMMA MAERSK  » (lancé en 2006) et ceux de la série  » MSC BEATRICE  » (lancé en 2009) ont désormais transité dans de nombreux ports. Les dimensions générales du  » CMA CGM MARCO POLO  » et ceux de la série  » Triple E  » diffèrent peu de celles de la série  » EMMA MAERSK  » dans les premières lignes du tableau ci-dessous. On notera que le  » MARCO POLO  » est moins large mais transport davantage de conteneurs que  » EMMA MAERSK « . Ceci s’explique par le nouveau concept de château déporté sur le 1/3 avant permettant de charger sans limite de visibilité derrière ce même château. En descendant plus bas dans le tableau quelques différences intéressantes apparaissent. Le déplacement de la série des  » Triple E  » est nettement plus important que le  » MARCO POLO  » mais leur puissance machine est de 20 % inférieure ! Cet écart est par ailleurs démontré lorsque l’on examine le rapport Puissance machine / Déplacement. Les  » Triple E  » ont 30 % de puissance en moins par tonne de déplacement que les 3 autres séries de navire. Cet écarts’explique par le souhait de Maersk de faire naviguer les  » Triple E  » à vitesse réduite (ndlr : Moins de vitesse = Moins de consommation avec plus de conteneurs chargés, business is business !). Puisque la vitesse n’est pas le critère retenu pour les  » Triple E  » la largeur est donc plus importante expliquant une fois encore sa plus grande capacité et son plus fort déplacement. La surface vélique des  » Triple E  » est également nettement plus importante mais le rapport Puissance des Propulseurs d’étrave / Surface vélique est quasi similaire pour les navires Maersk et meilleur que les 2 autres séries de navires (MARCO POLO et MSC Béatrice).

Sur la base de ces résultats on peut conclure que les capacités d’arrêt et de giration des  » Triple E  » sont plus réduites tandis que leur faculté à contrôler l’avant demeure intacte. Ce constat associé aux 22,5 % de surface vélique supplémentaire induit des conséquences non négligeables pour les remorqueurs lors des manœuvres portuaires.

Anticipation de la manœuvre de ces géants

Dans de nombreux ports la pratique courante est que les remorqueurs attendent à l’abri des digues. Une fois le remorqueur arrière croché, la maitrise du navire s’en trouve facilité. Toutefois comme la prise de remorque et son capèlement prend quand même quelques minutes l’aide des remorqueurs ne peut vraiment avoir lieu que lorsque le navire est déjà bien engagé à l’intérieur du port ! Les porte-conteneurs géants répondant plus lentement à la machine un nouveau  » timing  » s’impose : les remorqueurs doivent être crochés plus tôt. Pour certains ports cela signifie à l’extérieur des digues c’est à dire en zone de mer agitée. L’extension des digues est une solution au problème, mais préparer les remorqueurs, leurs équipages ainsi que les pilotes aux prises de remorque par mer agitée peut s’avérer plus économique. Les pilotes, les capitaines de remorqueurs ainsi que les commandants devront faire face aux challenges suivants avec l’arrivée de ces nouveaux géants :

– Les remorqueurs devront pouvoir crocher et travailler par mer agitée (cas d’Antifer)

– Les pilotes et les capitaines de remorqueur devront se familiariser avec la lenteur de réaction de ces grands PC.

– Ces grands PC s’avèrent être très vulnérables par fort vent Par conséquent mieux vaut pour ces acteurs impliqués dans la manœuvre d’être le mieux préparé.

EntrainementIl

est important que les pilotes et les capitaines de remorqueur soient bien préparés avant l’arrivée dans leur port de ces porte-conteneurs géants d’autant qu’une nouvelle approche de la manœuvre s’impose. Pour ce faire l’entrainement sur simulateur doit être combiné en impliquant à la fois le pilote embarqué sur le porte-conteneurs et le capitaine de remorqueur d’autre part, chacun étant dans un simulateur dédié. De cette façon les aspects techniques tel que d’une part le temps de réponse du remorqueur une fois l’ordre du pilote transmis et d’autre part l’aspect humain lors des communications entre les deux parties sont complètement analysés. La figure 1 montre des images d’un récent entrainement ou le pilote avait en charge un grand gazier LNG depuis la passerelle multi mission www.marin.nl , tandis que deux capitaines de remorqueur expérimentés étaient embarqués l’un sur le remorqueur avant et l’autre sur le remorqueur arrière depuis des simulateurs de manœuvre compact. Ces simulateurs compacts reproduisant la configuration de remorqueurs ASD avec la commande des treuils de remorque.

Lors de ces entrainements simulés, le rendu du monde virtuel se doit d’être aussi fidèle que possible du monde réel. Le retour qu’ont les pilotes hollandais de leurs clients passant sur simulateur confirme une fidélité très proche de la réalité ceci en raison de leur expérience en la matière depuis 30 ans. Toutefois les progrès constant en matière de numérisation rendront la simulation incontournable.

Efficacité du remorqueur par mer agitée et sécurité du remorqueur

Le passage de remorque et le travail du remorqueur par mer agitée soulèvent quelques questions tant sur le design du remorqueur que sur la conduite à tenir par son équipage. Des recherches pointues ont été menées par www.marin.nl sur ces points dans le cadre d’un projet commun intitulé  » SAFETUG « .

Un des points qui soulève le plus de questions lors du remorquage par mer agitée est la tension sur la remorque : des à-coups brutaux sur la remorque peuvent engendrer sa rupture. Cette rupture peut être évitée en installant un treuil de remorque actif ou passif amortissant les à-coups sur la remorque. Dans des conditions de mer pas trop agitée l’emploi de queue de remorque en nylon peut permettre également d’encaisser les surcharges. Une autre action peut être entreprise en minimisant les mouvements du remorqueur. Ce dernier point présente également l’avantage d’améliorer la sécurité et le confort de l’équipage du remorqueur présent sur le pont.

En dehors de l’aspect technique permettant d’améliorer prise de remorque et remorquage par mer agitée, l’effet des mouvements du remorqueur sur les performances de son équipage a également été scruté dans le cadre de  » SAFETUG « . Cette étude a été mené en effectuant un comparatif entre la simulation d’un remorquage fait depuis la plate-forme fixe du simulateur MARIN et le même exercice effectué sur le simulateur  » dynamique  » Desdemona. Le simulateur TNO Desdemona comprend une mini cabine de conception basique ne pouvant contenir qu’une personne à la fois (le capitaine de remorqueur). Dans cette cabine la scène est projetée sur 210°. Cette cabine est montée sur une plateforme dynamique (Voir figure 2). Le capitaine de remorqueur doit exécuter des manœuvres d’escorte de navire sous remorque et par mer agitée alors que la cabine remue de la même manière qu’un remorqueur en pareils circonstances dans la réalité. Afin de mesurer la charge de travail du capitaine de remorqueur ce dernier doit presser un bouton poussoir dès qu’un voyant rouge s’allume sur son pupitre.

L’un des premiers résultats obtenu par cette expérience montre que le capitaine le plus expérimenté assurait nettement mieux son travail de remorquage par mer agitée que le moins expérimenté. De manière générale les capitaines de remorqueur effectuaient un meilleur travail quand leur charge de travail était moindre. Par conséquent gagner de l’expérience par l’entrainement a un effet positif sur la fiabilité générale du remorqueur. Les résultats de  » SAFETUG  » ont également été utilisés pour améliorer notre simulateur. La réponse au remorquage par mer agitée ne peut être obtenue qu’en étant à l’écoute des essais effectués grandeur nature et www.marin.nl a en particulier la capacité de modéliser des cas complexes d’utilisation de treuils de remorque. Les compagnies de remorquage peuvent jouer sur les réglages du treuil de remorque et voir les effets induits sur la charge encaissée par la remorque lors d’interventions par mer agitée.

A l’heure actuelle www.marin.nl travaille sur un projet dont l’objectif est la sécurité du remorqueur et les scénarios possibles en situation d’urgence.

Force exercée par le vent

Un autre point à prendre en compte dans la manœuvre de ces nouveaux porte-conteneurs géants est la modélisation des forces exercées par le vent. Les forces exercées par le vent sur un navire sont habituellement calculées à 10 mètres de haut c’est à dire à la position du centre de gravité en prenant en compte des coefficients selon la dénomination de la force (latérale, frontale et moment giratoire) et la vitesse du vent. Ces coefficients sont souvent déterminés par mesures en soufflerie sur un profil type. Bien que cette méthode de calcul donne des résultats acceptables pour les navires situés au large, la même approche ne convient pas à la navigation en zone portuaire. Une zone soumise au vent dans un port est plus complexe à appréhender en raison des abris créés par exemple par les tanks d’hydrocarbure, les constructions hautes ou les autres navires alentours. En outre le vent agissant sur un navire n’est pas uniforme sur toute sa longueur et sur toute sa hauteur. Les variations de vitesse de vent sur la longueur d’un navire peuvent affectées sa manœuvre de manière non négligeable. Les essais effectués en soufflerie ne donnent pas de solution sur de tels effets de même que pour la façon de les prendre en compte en simulation.

La conséquence sur la manœuvre d’un navire peut se manifester de deux façons : surestimation ou sous-estimation de la force exercée par le vent. En appliquant une vitesse de vent uniforme agissant comme au large sur un navire, les effets de rugosité et d’abri évoqués plus haut ne sont pas pris en ligne de compte. Les études récentes entreprises par l’Université Technique d’Eindhoven pour le Port de Rotterdam montrent que les effets des obstacles sur la vitesse du vent à basse altitude sont non négligeables. Cela se remarque en particulier pour les terminaux à conteneurs ou le stockage de ces derniers à un effet sur la vitesse du vent rencontrée dans le bassin contiguë.

Applying results of such calculated wind fields……

 

 

Laisser un commentaire

Votre adresse e-mail ne sera pas publiée. Les champs obligatoires sont indiqués avec *